PRÉSIDENCE DE LA MAISON EUROPE
Sans beaucoup de risques de se tromper, on peut gager que le nom du président de la future Commission européenne ne sera pas connu avant fin juin. Ce poste devenu central dans la gestion de la ‘’Maison Europe’’, qui existe depuis plus de 60 ans, a connu somme toute un nombre restreint de titulaires : ils furent treize entre Walter Hallstein un allemand et Jean-Claude Juncker, un luxembourgeois. Treize comme l’étage de l’immeuble de Bruxelles où le bureau du président est installé… Treize dont trois luxembourgeois, deux français, deux italiens, un espagnol (durant six mois seulement, le record actuel de brièveté), et même un anglais alors même que Margaret Thatcher était Premier ministre du Royaume-Uni : il s’agissait de Roy Jenkins et il était travailliste…
Le candidat de l’Allemagne au poste de la Commission européenne, c’est Manfred Weber comme l’a expliqué la chancelière Angela Merkel crûment, bousculant au passage une forte tradition voulant que le couple franco-allemand ne s’affiche pas publiquement en désaccord. Force est de constater en recensant les titulaires du poste de président de la Commission européenne depuis 1957 qu’il n’y a pas eu d’allemand depuis la fin de mandat de Walter Hallstein en juillet 1967. En revanche, le Luxembourg (600 000 habitants, l’Union européenne comptant plus de 510 millions d’habitants) a donné trois présidents de la Commission européenne : Gaston Thorn (1981-1985), Jacques Santer (1995-1999), Jean-Claude-Juncker (2014-2019).
Ils furent deux présidents de Commission européenne italiens : Franco-Maria Malfatti (1970-1972), Romano Prodi (1999-2004), deux français aussi, François-Xavier Ortoli (1973-1977), Jacques Delors (1985-1995) et un seul espagnol, Manuel Marin, qui malgré ses six mois de mandat n’en réussit pas moins de mettre en œuvre l’une des plus populaires initiatives de l’Europe, le programme Erasmus. Il n’est pas inutile de noter que François-Xavier Ortoli joua un rôle majeur dans la construction du système monétaire européen devant conduire à l’Euro vingt ans plus tard et que Jacques Delors initia le grand marché européen, l’Europe marchande devant amener, dans son esprit, l’Europe sociale.
Côté appartenance politique, en un peu plus de 60 ans, les présidents de la Commission européenne de gauche (Sicco Mansholt 1972-1973 ; Roy Jenkins 1977-1981 ; Jacques Delors 1985-1995 ; Manuel Marin 1999 ; Romano Prodi 1999-2004) n’ont tenu les rênes que durant vingt ans. Et donc ceux de droite durant quarante ans.
Certains de ces présidents de la Commission européenne ont eu le temps pour eux : Jacques Delors, 10 ans, José Manuel Barroso le portugais 10 ans aussi (2004-2014).
Alors, certes, entre les présidents de la Commission européenne d’avant les années 1980 et ceux d’après, la fonction a considérablement évoluée, ne serait-ce qu’en raison de la création d’un véritable parlement européen élu par le peuple en 1979. Un parlement qui a conquis en mars 1999 son espace politique en obligeant le président Jacques Santer et sa commission à démissionner.
Avis au prochain président de la Commission européenne : le poste n’est pas de tout repos.
Denis Tardy