ARMÉE
En limogeant sans beaucoup d’égards le général de Villiers en juillet 2017, notre président de la République, chef des armées, avait sans doute voulu, maladroitement, ‘’marquer son territoire’’. Un an et quelques mois après, tout se passe comme si le même président de la République avait découvert les richesses de la culture militaire et décidé de se servir de l’armée hors de son champ d’action spécifique.
15 avril, 18h15 : la cathédrale Notre-Dame de Paris s’embrase, la France se fige, les pompiers (des militaires de la brigade spécifique pour Paris) s’activent en un combat qui sera in fine victorieux. Et l’on découvre que l’attachement d’un peuple à ses racines, que l’on croyait disparu, s’exprime avec une force incroyable. Le président de la République lui, sur place très vite, annonce très vite aussi sa volonté de reconstruction dans un délai de cinq ans. Et il nomme le 17 avril, le général Jean-Louis Georgelin, ancien chef d’état-major des armées (2006-2010) pour « veiller à l’avancement des procédures et des travaux qui seront engagés ». Un choix s’expliquant parce que le général est aussi oblat d’une abbaye bénédictine ?
Notre président, encore, a annoncé officiellement qu’il voulait supprimer l’école nationale d’administration (ENA). Et dans son entourage, on évoque que l’École de guerre pourrait servir de modèle à la refondation d’une école destinée à sélectionner et former la haute fonction publique. Référence militaire de nouveau pour Emmanuel Macron. L’École de guerre ? Sa caractéristique c’est, après une dizaine d’années de service, de sélectionner des officiers pour les destiner aux plus hautes responsabilités, à l’inverse de l’ENA où, sortir ‘’dans la botte’’ équivaut à les exercer, ces plus hautes responsabilités, dès la sortie de l’école, sans grande expérience de la France concrète… Louable intention bien sûr, sachant toutefois qu’il existe déjà une ‘’voie interne’’ d’accès à l’ENA pour des fonctionnaires déjà en poste qui pourrait être privilégiée.
Et puis dès lors que l’on parle de grandes écoles, l’une des plus anciennes (elle fut créée en 1794), sélectionne et forme également les meilleurs cerveaux, c’est Polytechnique. Elle aussi, comme l’ENA irrigue la haute fonction publique et contribue largement à la ‘’technocratie’’. Sans qu’il lui soit fait le même procès qu’à l’ENA. Parce que Polytechnique demeure une grande école… militaire ? Est-ce dans sa chasse ouverte contre les grands corps de l’État, un indice de plus du militarisme du Président ? C’est vrai que supprimer Polytechnique, cela aurait pu fâcher Valéry Giscard d’Estaing, un prédécesseur d’Emmanuel Macron, ancien de ‘’l’X’’. Et qu’il aurait fallu modifier le défilé du 14 juillet, les polytechniciens ouvrant depuis 1887 le défilé. Sans compter qu’à Versailles le vendredi 7 juin prochain aura lieu le suranné bal de ‘’l’X’’ (le 128°) rendez-vous traditionnel de la ‘’Haute’’.
Les participants n’auront-ils pas l’impression, avec robes longues et grands uniformes, de danser sur un volcan ?
Denis Tardy