Chronique du jeudi 13 septembre 2018

 

Histoire du Temps Passé au Présent

Chaque jeudi un regard sur l’actualité

 

 

VÉLO

 

Le gouvernement s’est mis dans la roue d’Yves Montand (À bicyclette) et de Joe Dassin (À Paris en vélo) en nous concoctant un plan vélo : où comment « le nouveau monde » fait appel à « l’ancien monde » ; et dans le calendrier cycliste des courses internationales, deux épreuves à étapes ont eu lieu en même temps : le tour d’Espagne et le tour de Grande-Bretagne, un avant-goût de Brexit ? Dans notre région, en cette période dédiée au patrimoine (les journées éponymes c’étaient le week-end du 15 au 16 septembre) ce coup de projecteur sur le vélo résonne avec beaucoup d’intensité : le pneu démontable avec chambre à air pour bicyclette a été mis au point et breveté par Édouard Michelin en 1891 (côté Auvergne) et côté Rhône-Alpes, Manufrance à Saint-Étienne commercialisa dès le début du XXe siècle jusqu’aux années 1960 les emblématiques vélos Hirondelle.

On imaginait que pour faire « nouveau monde », les SUV et autres engins de brousse reconvertis pour la jungle urbaine constituaient le symbole de déplacement idéal. Et bien non, notre gouvernement qui ne cesse de nous mettre en garde contre « l’ancien monde » et son inadaptation aux évolutions indispensables, ne rougit pas de militer pour le vélo, né au milieu du XIXe siècle ; le plan vélo qui vient d’être présenté à Angers prévoit vingt-cinq mesures pour encourager l’utilisation de ce mode de déplacement. Cinquante millions € par an seront consacrés à des aménagements spécifiques pendant sept ans, avec notamment l’objectif que les français soient plus de 2 % à faire leur trajet domicile-travail en vélo : les fonctionnaires dans ce cas pourraient bénéficier d’une prime de 200 € par an. Peut-on aller jusqu’à parler de retropédalage de ceux qui nous gouvernent ? 

Dans l’actualité sportive, l’épilogue du tour d’Espagne cycliste approchait en fin de semaine dernière, avec arrivée prévue à Madrid dimanche. Non sans être passé à Andorre. À l’heure où l’on écrit ces lignes on ne savait pas encore qui revêtirait le maillot rouge de vainqueur. Curieusement, la Vuelta s’est déroulée en même temps que le tour cycliste de Grande-Bretagne mais avec moins d’étapes (du 2 au 9 septembre). C’est un français qui l’a emporté, Julian Alaphilippe. On ne sait pas si cela a donné du baume au coeur à Michel Barnier, négociateur du Brexit pour l’Union européenne.

Enfin alors que les Journées européennes du patrimoine devaient connaitre leur traditionnel succès du 15 au 16 septembre, il s’impose de rappeler qu’en matière de vélo, la région Auvergne-Rhône-Alpes en connait un… rayon si l’on ose écrire. À Saint-Étienne dès le début du XXe siècle les bicyclettes Hirondelle construite par Manufrance vont connaitre un succès fou… et équiper les brigades cyclistes de la police de Paris jusqu’en 1984. Ces policiers avec leur pèlerine flottant au vent qui leur donnait une silhouette d’oiseau n’ont-ils pas été surnommés « hirondelle » ? À Clermont-Ferrand en 1891, après avoir dépanné un cycliste anglais pour un pneu, Edouard Michelin comprenant l’intérêt de « rouler sur l’air » met au point un pneu démontable pour bicyclette : le bilan est déposé le 18 juin. Ce sera le premier succès commercial de Michelin à l’étranger.

Si Manufrance a disparu (les vélos « hirondelle » ne lui ont pas permis d’avoir des printemps éternels), Michelin lui demeure l’un des plus grands groupes mondiaux. Témoin florissant de ce qu’il n’y a pas de séparation entre « ancien » et « nouveau monde », mais que l’avenir demeure l’héritage du passé.

Denis Tardy

 

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