TEMPÉRATURE
Pour un américain du nord, les 46° C de température qui étaient encore jusqu’au 24 juillet le record absolu de chaleur en France, relevés à Vérargues (Hérault) le 28 juin dernier, ces 46° donc ne vont rien lui dire : pour lui en effet, c’est de 114,8° C qu’il s’agit… Outre-Atlantique on s’en souvient, la température est mesuré en degrés Fahrenheit ; chez nous en degrés Celsius quant bien même l’invention de l’astronome suédois Anders Celsius en 1742 ne correspond pas exactement à la définition de l’actuel degré dit Celsius. Abrégé en C, le nom de cette unité de mesure aurait pu renvoyer à Christin (Jean-Pierre), un lyonnais du XVIII° siècle.
Les records de chaleur enregistrés en France et en Europe ces derniers jours incitent à s’interroger sur les méthodes de mesure de température, leur histoire. Car si aujourd’hui, ce que l’on appelle degré Celsius, unité la plus utilisée, échelonne la température de 0° C (fonte de la glace) à 100° C (l’eau bout), il n’en fut pas toujours ainsi. Gabriel Fahrenheit, un scientifique allemand, avait en 1720 conçu une échelle de référence avec comme point bas la température la plus basse enregistrée à Danzig durant l’hiver 1708-1709 et comme point haut la température du sang de cheval; il divisa l’intervalle entre les deux en douze unités et chaque unité en huit degrés. Dans cette échelle de quatre-vingt seize degrés, Fahrenheit constata que l’eau gelait à 32° C et entrait en ébullition à 212° C, soit une différence de 180° C là ou l’échelle de Celsius ne définit que 100° C. C’est aussi à Fahrenheit que l’on doit l’utilisation du mercure dans les thermomètres, alors que Réaumur, un physicien et naturaliste français (1683-1757) se servait d’alcool. Le thermomètre de Réaumur étalonnait la mesure de la température en quatre-vingt parties égales, entre la congélation et l’ébullition de l’eau.
Le thermomètre de Réaumur n’est plus utilisé, celui de Fahrenheit si, aux États-Unis en particulier ; quand au thermomètre de Celsius, ce n’est pas tout à fait celui de Celsius. Car le suédois avait en 1742 attribué 0° C à la température de l’eau qui bout et 100° C à la température de l’eau qui gèle. Après sa mort, cette échelle fut inversée (100° C pour l’eau bouillante, 0° C pour l’eau gelée) sans doute par un autre scientifique suédois, Carl von Linné, et le thermomètre fut présenté à l’Académie suédoise en 1745.
Mais deux années auparavant, un scientifique lyonnais, Jean-Pierre Christin, fait fabriquer et présente un thermomètre centigrade à mercure, étalonné de 0° C (fonte de la glace) à 100° C (température de l’eau qui bout). Et le plus incroyable, c’est que Jean-Pierre Christin qui connaissait les thermomètres de Fahrenheit et de Réaumur, ignorait tout de celui de Celsius modifié par Linné. C’est grâce au régime révolutionnaire, qui intègre en 1794 la mesure de la température au système métrique, que les inventions concomitantes de Celsius et Christin ont pu connaitre leur développement.
Mais le °C renvoie à Celsius, pas à Christin…
Denis Tardy