Chronique du jeudi 23 mai 2019

 

MORT

 

Avec Alain Delon, Niki Lauda, Vincent Lambert sans oublier Cédric de Pierrepont et Alain Bertoncello, l’actualité nous a fourni ces derniers jours de belles opportunités pour réfléchir à la seule certitude absolue que nous ayons en ce bas monde : on va devoir le quitter un jour ou l’autre.

« Ce soir, c’est un peu un hommage posthume, mais de mon vivant… Je vais partir, mais je ne partirai pas sans vous remercier ». Il a fait preuve de lucidité, l’acteur Alain Delon (bientôt 84 ans), en recevant, enfin, une distinction au festival de Cannes pour l’ensemble de sa carrière, il y a quelques jours. La mort, çà fait partie de la vie ; la mort c’est comme la vie mais sans…

L’actualité (qui a fait de la mort un de ses fonds de commerce) a été prolifique sur ce sujet la semaine dernière: outre la palme d’or ‘’posthume’’ de Delon, ce fut le décès du coureur automobile (du pilote de F1 si vous préférez, question de génération…) Niki Lauda. « Je suis brièvement mort mais j’ai ressuscité » aurait-il confié au journal suisse Blick après un accident qui l’avait laissé dans les flammes près d’une minute en 1976. Le (double) miracle, c’est qu’il en ait réchappé (trois conccurents de la course l’ayant extrait de son engin) d’une part, et d’autre part qu’il se remette au volant six semaines après. « Vous ne connaissez ni le jour ni l’heure » avait expliqué Jésus à ses disciples avec les conséquences que cela impliquait, épisode évoqué par les évangélistes Matthieu et Marc.

Et puis l’actualité a remis en scène, si l’on ose écrire, Vincent Lambert, victime d’un accident de la route le 29 septembre 2008 provoquant un traumatisme crânien. Dix ans après on ne sait pas s’il y aura arrêt des soins ou pas pour cet homme dont les derniers médecins experts l’ayant examiné (en septembre 2018) avaient alors estimés qu’il était dans « un état végétatif chronique irréversible »  mais que « ses besoins… ne relèvent pas de l’acharnement thérapeutique ou d’une obstination déraisonnable… », ces deux dernières expressions étant celles de la loi encadrant la possibilité d’abréger la vie d’un patient par arrêt des soins et/ou par soins palliatifs. Comme souvent dans ce type de situation où les tensions s’exacerbent, on a cru rêver à l’écoute de beaucoup de déclarations, de prises de position, interventions venant de toute part, souvent péremptoires quand elles ne relevaient pas de la paille dénoncée dans l’œil du voisin en ignorant la poutre dans son propre oeil. Nul doute que ce manque d’humilité et de retenue dans nombres de ‘’commentaires’’, cet étalage de certitudes, ne facilitera pas l’approche de la moins mauvaise des solutions dans une situation où il n’y en a pas de bonnes. Mort, où est ta victoire ?

Aux leçons sur la mort d’Alain Delon, Niki Lauda ou à propos de Vincent Lambert, on aura garde d’oublier celles apportées elles aussi récemment par les deux membres du commando tué en Afrique : Cédric de Pierrepont et Alain Bertoncello sont montés à l’assaut sans faire usage de leurs armes, pour ne pas mettre en péril la vie des otages qu’ils venaient délivrer.

« Vois ces jeunes mourir, Vois-les marcher, vois-les courir À des morts, il est vrai, glorieuses et belles, Mais sûres cependant, et quelquefois cruelles »¹.

Denis Tardy

 

¹ La mort et le mourant, « Fables livre huitième », La Fontaine.

 

 

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