IMPÔTS
Normal que vous ne connaissiez pas Grand Bourgtheroulde, commune de l’Eure en Normandie, où le président de la République a lancé le ‘’Grand débat’’ : c’est une commune nouvelle créée en 2016, regroupant Bosc-Bénard-Commin, Bourgtheroulde-Infreville et Thuit-Hébert… ouf. Le maire a expliqué que sur le cahier de doléances de la commune, c’est une question fiscale, celle de l’ISF qui a été la plus évoquée. L’occasion d’une plongée dans le temps pour évoquer les tentatives, sous l’Ancien régime, de taxer les ‘’riches’’. Avec des impositions aux noms évocateurs : édit du Toisé, taxe des Aisés, édit du tarif…
Même sous l’Ancien régime, la tentation de taxer les ‘’riches’’, à l’instar de ce qui se passe aujourd’hui avec les débats sur l’ISF, existait de la part d’un État royal toujours à court d’argent. Quelques exemples : Henri IV, en 1604, décide de taxer la transmission des offices : les officiers achetaient un poste de la fonction publique, qu’ils pouvaient jusqu’alors transmettre à leurs descendants. Charles Paulet, à l’origine de cette taxe sur la transmission des offices (d’un montant de 1/60e du prix de la charge concernée) permit à l’État de récupérer entre 5 et 10 % de ses recettes. Souvent contestée, la ‘’Paulette’’ a survécue, même à la révolte contre l’absolutisme que fut la Fronde.
Et justement, cette Fronde (1648-1653), révolte de privilégiés, sera provoquée entre autre par une ponction fiscale de plus en plus forte : entre 1600 et 1650, les dépenses de l’État sont multipliées par cinq ! Pour ‘’boucher les trous’’, le cardinal Mazarin fait feu de tout bois. Son ministre des Finances (on dit alors surintendant), Particelli, cherche des recettes avec l’édit du Toisé (1644, nouvel impôt foncier sur les bâtiments des faubourgs de Paris), avec aussi la taxe des Aisés (1644 qui comme son nom l’indique ne connait que les ‘’riches’’), ou l’édit du Tarif (1646, taxe sur les marchandises qui ne sera jamais appliquée).
Un peu plus tard, en 1710, l’impôt appelé ‘’dixième’’ est créé ; c’est un prélèvement fiscal sur tous les revenus (fonciers, mobiliers, issus de l’activité économique) équivalent à 10 % de prélèvement comme son nom l’indique. Pour y échapper, certains contribuables, ce fut le cas du clergé, préfèrent ‘’racheter’’ leur impôt, par le versement d’un ‘’don gratuit’’. En 1749, le ‘’dixième’’ est remplacé par le ‘’vingtième’’, impôt direct perçu auprès de toute la population dont le montant correspond à 5 % (un vingtième) des revenus. Cet impôt somme toute très moderne hérisse les privilégiés, notamment le clergé et la noblesse ; en 1787, la faillite de l’État guettant, les exemptions sont supprimées. Trop tard : deux ans plus tard, la Révolution supprime le ‘’vingtième’’.
Révolution qui avec la Déclaration des droits de l’Homme et du citoyen (20-26 août 1789) prévoit avec l’article 13 : « Pour l’entretien de la force publique et pour les dépenses de l’administration, une contribution commune est indispensable : elle doit être également répartie entre tous les citoyens, en fonction de leurs facultés ».
Sans distinguer riches ou pauvres.
Denis Tardy