FUNÉRAILLES
Appel pathétique il y a quelque jours de Stephen O’Brien, le responsable des opérations humanitaires de l’ONU, suppliant les belligérants de la bataille d’Alep de « faire tout leur possible afin de protéger les civils et pour que la ville ne devienne pas un gigantesque cimetière. »
Sûr que les martyrs d’Alep, il n’y a aucune chance qu’ils disposent d’une urne funéraire en bois de cèdre protégée par une boite en verre ainsi qu’il en est au même moment pour le « camarade Fidel »… qui même mort continue d’entraver (c’est une litote) la vie des cubains : avec les quatre jours de parade à travers l’île du cortège funéraire du dictateur, on ne sait qui de l’odieux ou du ridicule le dispute l’un à l’autre.
Et pendant ce temps dans notre pays, l’Assemblée nationale ressortait des cartons une vieille proposition de loi datant de deux ans visant à faciliter l’organisation de funérailles républicaines. Voté en première lecture, le texte prévoit que « chaque commune, dès lors qu’elle dispose d’une salle municipale adaptable, la met gratuitement à disposition des familles qui le demandent et garantit ainsi, présence d’un élu en sus, l’organisation de funérailles républicaines qui leurs permettront de se recueillir. » Soit dit en passant, une loi de la fin du XIXe siècle prévoyait déjà de telles funérailles… mais rien n’obligeait les communes de les accueillir. Au moment où l’État réduit drastiquement les dotations aux communes, sûr qu’elles vont apprécier une charge supplémentaire ! Parions dès lors que le « Grand conseil des communes de France », le Sénat si l’on préfère, risque fort de faire barrage à cette proposition de loi.
Dans cette actualité en décalage avec le calendrier (le fête des morts, c’était le 2 novembre), une exposition originale, commémorant un cent cinquantième anniversaire est quelque peu passé inaperçu chez nous… pourtant Genève n’est pas très loin. Cet anniversaire, c’est celui de la création en 1866 du service public de pompes funèbres de la cité helvétique, devenu totalement gratuit en 1876 : le secteur privé ayant cependant été conservé, le service public n’en assure pas moins les 2/3 des funérailles à Genève. Quant à l’exposition commémorative, joliment baptisée Open End, elle devait… fermer ses portes si l’on ose écrire, le 30 novembre. Les seize oeuvres contemporaines exposées visaient, dans le cadre du cimetière genevois des rois (là où fut enterré Calvin) à « inviter à la rêverie, à la réflexion sur notre rapport à l’au-delà, mais également à la vie » et à « réactiver le regard sur les objets du deuil, l’art dit funéraire, notre rapport à la mort et à ses rites. »
Denis Tardy