JAMAIS DEUX SANS TROIS
Jean-Marie Gustave Le Clézio en 2008, Patrick Modiano en 2014, les deux écrivains français ayant reçu le prix Nobel de littérature au XXIe siècle¹, on avait espéré au nom du proverbe « Jamais deux sans trois » qu’un troisième auteur de notre pays reçoive cette distinction dans une compétition où les pronostics sont souvent battus en brèche. Mais c’est Bob Dylan qui est sorti du chapeau.
« Jamais deux sans trois » ? L’actualité y renvoie beaucoup ces derniers temps. Prenez Vladimir Poutine, qui a en définitive annulé sa visite controversée à Paris prévue pour le 19 octobre. Il a fait mentir une nouvelle fois le proverbe. Souvenez-vous : c’était en 1985, avec la visite en France du général Jaruzelski ; Laurent Fabius, le Premier ministre s’interroge tout haut sur l’opportunité de le recevoir, évoquant son « trouble » à l’Assemblée nationale et à la télévision, parce que le dirigeant polonais réprime le syndicat Solidarnosć. Un peu comme François Hollande ces derniers jours avec Poutine. Le président de la République recevra tout de même le dirigeant polonais. Dans la même veine, c’est Rama Yade, secrétaire d’État aux Droits de l’Homme qui s’indigne en décembre 2007 de la visite de Mouammar Khadafi venu planter sa tente (au sens propre) à l’hôtel Marigny : « Notre pays n’est pas un paillasson sur lequel un dirigeant terroriste ou non peut venir s’essuyer les pieds du sang de ses forfaits… La France ne doit pas recevoir ce baiser de la mort ». La visite, qui s’est éternisée, coïncidait avec la Journée mondiale des Droits de l’Homme…
« Jamais deux sans trois » toujours avec l’élection présidentielle en vue pour 2017. Retour à l’année 1969 : le Général De Gaulle a quitté le pouvoir, il faut désigner un nouveau Président de la République. Au soir du 1er juin, c’est la surprise : Georges Pompidou et le centriste Alain Poher privent la Gauche d’une présence au second tour. Ce qui se reproduira un certain 21 avril 2002 encore dans toutes les mémoires, Jacques Chirac et Jean-Marie Le Pen étant seuls qualifiés pour le second tour. Une configuration envisageable pour mai 2017… Qui justifierait alors le proverbe.
Tout comme le fit en 1948 le constructeur automobile Peugeot en sortant son modèle… 203, qui sera commercialisé jusqu’en 1954, à 685 000 exemplaires.
Mais au fait, ce « Jamais deux sans trois », en connait-on l’origine ? Pas vraiment, non, bien qu’au XIIIe siècle on utilisait l’expression « tierce fois c’est droit » pour signifier la nécessité de refaire trois fois une action afin qu’elle soit réussie. Et qu’on la retrouve, cette expression, dans beaucoup de langues. Comme en anglais avec le It´s a hat-trick, littéralement « C’est un tour de chapeau », que les amateurs de football connaisse bien.
Et un, et deux, et trois… on peut toujours l’espérer pour le prochain France-Suède.
Denis Tardy